Auteur(e) Jean-Philippe Morin
Sans vous étaler l’historique complet du commerce et de la consommation du sodium, il est intéressant de comprendre comment et pourquoi plusieurs facteurs, même historiques, ont pu jouer sur l’importance du sel et de sa consommation. Voici les bons et les mauvais côtés du sodium.
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Sel et sodium : les bons et les mauvais côtés
À l’ère paléolithique, le total sodique journalier était autour de 1g ou en deçà. La source principale de sel était la viande, à raison d’environ 0,6g par livre, ce qui est très peu tenant compte que la quantité naturelle de sodium dans la viande animale est peu élevée. Il y a environ 5000 ans, le peuple chinois a découvert les vertus de conservation du sel. S’en est suivi un « boom » dans la consommation de sel pour préserver la nourriture. Finalement, la consommation de sodium a atteint un sommet à l’ère moderne, avec la hausse significative des produits transformés. Tout cela pour dire que la consommation sodique moyenne a varié à travers l’histoire, passant de 1g ou moins à l’époque des chasseurs-cueilleurs, à 9 à 12g au 19e siècle[1]. Cela amène son lot de problèmes et beaucoup de questionnements à savoir si on peut consommer trop ou trop peu de sel, et quelles sont les conséquences dans chacun de ces scénarios.
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Plusieurs choses doivent être considérées lorsqu’on évalue les besoins en sel d’un individu. Chez une personne « saine » mais plutôt sédentaire, les besoins en sodium sont plus bas que chez les athlètes, mais plus élevés que chez les personnes aux prises avec des conditions telles que : l’insuffisance cardiaque ou l’hypertension, l’insuffisance rénale chronique ou la cirrhose hépatique. Pour cette raison, les recommandations générales (en pourcentage) que vous voyez sur les étiquettes nutritionnelles ne sont pas nécessairement valables pour tout le monde.
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Le plus gros problème auquel on se bute en essayant d’évaluer les besoins et les recommandations en sodium pour une population saine, c’est qu’il y a presque autant de barèmes pour qualifier une consommation de sel d’élevée qu’il y a d’études… Dans certains cas, une consommation élevée peut être plus de 2400mg par jour, alors que dans d’autres cas on parle de plus de 4,5g… Si une consommation continuellement élevée de sel est associée avec l’augmentation de la pression sanguine, une consommation exagérément faible en sel est associée à l’hypotension, à la léthargie et à différents maux[3]… On cherche donc un juste milieu, sachant que l’être humain peut survivre avec un apport sodique aux extrêmes, c’est-à-dire aussi bas que 200mg et aussi élevé que 10 300mg chez les Indiens Yanomami du Brésil[4]…
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La recommandation américaine établie en 2015 est de 2300mg, avec une limite inférieure un peu plus conservatrice de l’American Heart Association de 1500mg. Celle du World Health Organization est de 2000mg par jour. La recommandation pour la population générale est donc dans les eaux de 2,3g par jour, en visant la prévention de l’hypertension. Chez une personne relativement « en santé », le système rénine-angiotensine-aldostérone (au niveau rénal) fait un bon travail de conservation et de filtration du sodium qui est nécessaire aux utilisations physiologiques. On remarque qu’en bas de 3g de sodium par jour, ce système est plus actif pour retenir le sel dans l’organisme[5]. Cela nous permet de constater qu’il y a certainement une marge de manœuvre possible… Plus de recherche est nécessaire pour évaluer l’incidence d’une consommation moyenne de sel (>2300>5000mg) sur les risques de maladies cardiovasculaires.
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Chez les athlètes d’endurance, les besoins en sodium sont plus élevés que chez les gens sédentaires, en accordance avec le niveau de sudation. Vous conviendrez que de mesurer le volume de la sueur est toutefois une tâche bien hardie… Quelques points doivent être soulevés dans le contexte d’un entraînement sérieux :
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Mais qu’est-ce que l’hyponatrémie?
L’hyponatrémie se présente lorsque la concentration de sodium dans le plasma sanguin est inférieure à 135 mmol/L. Durant l’exercice, les symptômes sont ressentis lorsque les niveaux chutent en bas de 130 mmol/L. Ballonnements, nausées, vomissements, maux de tête, confusion, délire, convulsions, détresse respiratoire et perte de conscience[6] sont des manifestations d’un possible état d’hyponatrémie. Il s’agit donc d’une condition très sérieuse qui nécessite l’attention médicale immédiate.
Les gens atteints de cardiopathies sont le premier cas de patients qui doivent suivre une alimentation hyposodée. Leur apport en sodium se situerait donc dans la tranche inférieure de l’apport faible en sodium (2g et moins). Le raisonnement est qu’un apport élevé en sel pourrait empirer leur problème d’hypertension, et l’hypertension chronique est associée à des maladies cardiovasculaires ou des arrêts cardiaques. Si l’hypertension est très importante, cette recommandation de 2g peut être revue à la baisse.
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Chez les gens aux prises avec l’insuffisance rénale, il y aura des lacunes au niveau de la filtration du sodium. Étant donné que beaucoup de sodium sera retenu, il y aura également une rétention d’eau et l’apparition d’œdème. La surabondance de fluide sera problématique, car elle va mener à un problème d’hypertension[7]. Ces patients seront donc également soumis à une diète hyposodée.
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Chez les gens atteints de la cirrhose du foie, les veines du foie et les tissus cicatriciels formés en raison du foie endommagé vont faire en sorte que l’organe a une certaine rigidité. Cette rigidité va amener des problèmes de circulation au niveau du foie et va causer une pression dans la circulation dite « portale », ce qui va engendrer un ensemble de problèmes médicaux plus poussés.
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Un excès de sodium à long terme peut également amener une augmentation de la masse du ventricule gauche du cœur (responsable de pomper le sang pour la circulation systémique), augmenter les risques de cancer gastrique, de pierres aux reins, d’ostéoporose et de protéinurie. Il y a un lien entre la consommation trop importante de sodium et l’excrétion (évacuation) de calcium. On peut donc comprendre le lien avec l’ostéoporose puisque le calcium est important pour maintenir le capital osseux. Finalement, des maux de tête peuvent également être causés par un excès de sodium[8].
Les recommandations générales données dans l’article me semblent conservatrices pour des individus en santé. Si vous consommez en majorité des aliments sains, vous ne devriez pas accorder trop d’importance au calcul du sodium en général, puisqu’il est peu probable que votre apport en sodium quotidien soit très élevé. De plus, sans condition médicale particulière, votre système rénal fait un bon travail d’élimination du sodium en excès. Alors, pas de panique! En espérant avoir su vous aider à approfondir vos connaissances sur un sujet qui semble, au premier abord, anodin.
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[1] https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC4105387/
[2] https://www.precisionnutrition.com/all-about-sodium
[3] Mente, A., O’Donnell, Martin J., Yusuf, S. (2016). How robust is the evidence for recommending very low salt intake in entire populations?, Journal of the American college of cardiology, 68(15), 1618-1621.
[4] Appel, Lawrence J. (2017). Salt intake, salt restriction, and primary (essential) hypertension, Page consultee à https://www.uptodate.com
[5] Mente, A. et al.
[6] Thomas, T., Erdman, K. A., & Burke, L. M. (2016). Position of the Academy of Nutrition and Dietetics, Dietitians of Canada, and the American College of Sports Medicine: Nutrition and Athletic Performance. Journal of the Academy of Nutrition and Dietetics, 116(3), 501-28.
[7] https://www.uptodate.com/contents/overview-of-hypertension-in-acute-and-chronic-kidney-disease?source=see_link§ionName=Benefits+of+sodium+restriction&anchor=H17855216#H17855216
[8] Appel, Lawrence J.
Jean-Philippe Morin
Étudiant en kinésiologie
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